SILENCE

Publié le par LAURENCE NOYER

Il faut aussi être capable d'interpréter le silence, de l'écouter en quelque sorte. Ainsi dans Crime de Village on trouve ces mots: " Hautement, ils supposaient, cachée derrière le silence, toute une vie pleine de luttes" . Il y a effectivement " derrière le silence" toute une vie cachée de souffrances et de peurs. Dans ces mots affleure la sensibilité de Jules Renard qui nous laisse trop souvent à voir le côté caustique du personnage public qu'il s'est forgé. La souffrance et la joie ne s'expriment pas nécessairement par des mots. Au contraire "Tous immobiles et muets de joie" écrit Jules Renard. Et souvent on trouve ces mots qui en expriment plus longs que ce qu'ils disent: "Tous restèrent longtemps silencieux" Nous constatons combien les émotions s'expriment chez Jules Renard dans le silence car le silence est aussi parfois embarrassant et non maîtrisable. Comment franchir effectivement ce lourd barrage du silence, ce no man's land des mots ? Il faut apprivoiser le silence, le faire sien: "Mais par degré, il se fit à la monotonie qui s'imposait, au silence peu troublé" Car le silence n'est pas méconnaissance, tout au contraire; " Petite fille silencieuse, elle revenait de loin et en savait long" Quant à "Marthe, tout entière à l'acuité d'une sensation muette, immobile, sans souffle, attendait" On est en effet dans l'attente face à une personne silencieuse. On ne veut pas déranger cet état de fait par des éclats de voix qui comme tout éclat, brise et surtout tranche. Les mots sont rudes parfois lorsque le silence est ouaté: "Parmi ces entours où tout semblait ouaté de silence" Tout est secret et mystérieux dans le silence. Il faut percer ce secret et pénétrer le mystérieux comme Jules Renard le dit si bien dans la Pipée: " tout semblait du silence comme pour surprendre un mystère"

Extrait de "La vie brisée de Jules Renard" de Julien Molard

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